Au mois d'août de cette année, j'ai eu l'occasion de faire un travail pastoral dans notre mission à Befasy. Le père Marek Ochlak a dû se rendre en Pologne pour prendre le poste de Directeur de la Procure de la mission, mais le nouveau supérieur de la mission - le père Stanisław Kazek – n’était pas encore sur place à cause de la fermeture des frontières Malagasy.
Befasy est un petit village, située dans le diocèse de Morondava, à 50 km au sud de la capitale du diocèse. Le 27 novembre 2016, les Oblats ont officiellement repris cette mission après 15 ans de travail des missionnaires Salettins. Deux Oblats ont été affectés à cette mission: le P. Marek Ochlak (le supérieur et le curé) et le séminariste Randriamanjaka Odon.
Actuellement, trois Oblats y travaillent
• Père StanisławKazek - Supérieur, économe et curé
• P. Ratovoson Andry Aurélien - Responsable des écoles, missionnaire en brousse
• P. Andriamamonjisoa Léonce Jean Arthur - un missionnaire en brousse
Durant mon séjour d'un mois, j'ai travaillé sur place à Befasy, mais j'ai souvent voyagé dans les communautés chrétiennes dans la brousse : Misokitsy et Mitsinjo. La communauté de Misokitsy m'a fait une grande impression. La plupart des habitants de cette région du Menabe sont généralement des Sakalava. Mais on peut aussi rencontrer des tribus comme les Antandroy, les Vezo, les Betsileo, les Merina, les Mahafaly... De ce fait, il existe de nombreuses coutumes et traditions dans la mission Befasy. A Misokitsy, j'ai travaillé pour la première fois avec la tribu Antandroy qui habite ce village. Et voici quelques mots sur cette tribu.
Antandroy c'est un peuple de pasteurs itinérantsou « Ceux des épines » sont établis à l’extrême sud de Madagascar. Si on leur prête des origines arabes, juives mais aussi indo-pakistanaises c’est avant tout une ethnie ancrée dans une culture pastorale des plus austères. S’exprimant dans un dialecte malayo-polynésien, ils vivent dans l’une des contrées les plus arides de la Grande Île, l’Androy. A l’origine, les habitants de l’Androy étaient les Karimbola et les Mahandrovato.
Au XVè siècle, ces deux royaumes furent soumis par le prince Andriamanare de la région de Fort-Dauphin qui décida de s’y établir et de les réunir en un seul royaume : les Antandroy. Malheureusement, cette unité prendra fin au XVIIIe siècle suite à de nombreuses invasions et fit place à de nombreuses guerres intestines régulièrement ponctuées de vols de bœufs, la seule source de richesse dans la région.
Réputés pour être de grands guerriers courageux, les Antandroy sont également très attachés aux traditions ancestrales. Avec un territoire allant de Orombe à Bekily jusqu’à Fort-Dauphin, les Antandroy pratique le culte de la mort où le zébu y tient une place de choix. Signe de richesse, le nombre de zébu mesure la notoriété mais aussi la position sociale. A sa mort, tout ou partie du bétail possédé est parfois tué et consommé par la famille et la tribu. Les cornes serviront à orner la tombe du défunt qui en fonction de sa richesse sera plus imposante.
Maîtrisant l’art divinatoire, les Antandroy se réfèrent toujours aux conseils de leurs devins ou « Ombiasy » que ce soit pour la construction d’une tombe ou d’importants évènements à venir. Le cercueil est constitué de deux troncs d’arbres vidés qui sera violemment secoué au cours d’une danse funéraire avant d’être enterré. A noter que les tombeaux royaux peuvent mesurer jusqu’à 50m de côté !
La danse du Bilo est une danse faite de transes très pratiquée par cette ethnie pour extraire dit-on le mal. Le Beko (a capella) est un chant funéraire typiquement Antandroy faites de litanies pour accompagner l’esprit du défunt.
Implantés dans l’une des régions les plus sèches de Madagascar, les Antandroy ne pratiquent que très peu une culture vivrière par manque d’eau (manioc, patate douce, maïs…). Les Antandroy sont réputés pour être de grands orfèvres et spécialistes du…tatouage !
Même si l’élevage de bovins et de caprins restent leur activité principale, de plus en plus de jeunes et de femmes Antandroy se lancent dans la quête de saphir à Tsihombe, à une cinquantaine de kilomètres de Beloha. Le tissage du « lamba mena » ou tissus en soie sauvage est également pratiqué par les femmes Antandroy à Ambondro et revendu sur les différents marchés de l’Androy. A noter que certains Antandroy s’interdisent de manger du porc.
J'ai beaucoup entendu parler des Missionnaires de St. Vincent de Paul (Lazaristes - principalement espagnols), qui travaillent depuis de nombreuses années au sein de la tribu Antandroy, que c'est une tribu très difficile à évangéliser. Parfois, il faut de nombreuses années pour le convaincre à la foi catholique, mais quand ils découvrent notre foi et sont baptisés- ce sont de très bons chrétiens, très dévoués à la foi catholique.
Et c'est ce que j'ai rencontré chez les Antandroy à Misokitsy. Ils sont venus ici pour chercher de meilleures terres à cultiver et de la nourriture pour leurs troupeaux. Ils chantent et dansent magnifiquement ainsi chaque liturgie de la Sainte Messe est magnifiquement préparée et animée. Les jeunes sont très impliqués dans la vie de la paroisse, ainsi que dans l'animation de leurs pairs plus jeunes. Ils ont même deux équipes de football, l'une des garçons et l'autre des filles. Je suis très heureux de cette nouvelle expérience missionnaire.
P. Henryk Marciniak - Directeur d'OMIFILM